Le public est invité à donner son avis sur le lâcher d'une ourse qui, en 2011, ne fera que maintenir les effectifs de l'animal à une vingtaine dans les Pyrénées, mais qui suscite le mécontentement des adversaires du plantigrade sans pour autant satisfaire ses défenseurs.

"Insuffisante" pour les partisans de la réintroduction de l'animal, l'arrivée annoncée dans le Béarn (Pyrénées-Atlantiques) d'une femelle au printemps a tout pour déplaire aux "anti-ours".

Du 27 décembre au 4 février, les habitants de 930 communes du massif pyrénéen pourront adresser leurs remarques au préfet des Pyrénées-Atlantiques sur ce projet qui a pour ambition de maintenir les effectifs et non de les renforcer. Ils pourront télécharger sur le site de la préfecture un dossier contenant des informations sur l'incidence qu'aura cette arrivée, tant sur la conservation de l'espèce que sur les milieux naturels ou l'activité humaine.

La nouvelle venue doit remplacer Franska, tuée lors d'un accident de la circulation en 2007.

D'après Alain Reynes, directeur de l'association Pays de l'ours-Adet, 18 ou 19 ours habitent les Pyrénées centrales tandis que la "situation est dramatiquement simple" dans l'ouest du massif, avec deux mâles seulement. L'Etat réserve encore ses chiffres officiels pour 2010. En 2009, il faisait état de 17 ours au minimum, mais certains ont pu disparaître depuis. En revanche, quatre oursons sont nés depuis.

Les observations du public doivent être transmises au ministre de l'Ecologie, à qui reviendra la décision d'accorder son feu vert à l'opération. D'ores et déjà, les "anti-ours" ont dénoncé une consultation "bidon" destinée à entériner une "décision déjà prise".

Gérard Dubuc, président de l'Aspap (Association de sauvegarde du patrimoine d'Ariège-Pyrénées), n'exclut pas une "action judiciaire" contre l'Etat.

Avec le lâcher annoncé, "on est en situation de guerre et on va riposter", a renchéri Bruno Besche-Commenge, vice-président de l'ADDIP, un regroupement d'associations et d'élus "anti-ours". "On prendra des mesures sur le terrain, y compris sauvages", a-t-il lancé.

Pour ces associations, il y a "un problème de fond" derrière l'ours. "On n'a rien contre ces petites bêtes en elles-mêmes", dit M. Besche-Commenge. Mais elles refusent la volonté qui se cacherait derrière la réintroduction: "l'ensauvagement" de massifs montagneux humanisés "depuis des millénaires".

Pour les défenseurs de l'ours en revanche, l'arrivée d'une femelle est "une étape importante mais qui ne suffira pas". "Personne ne peut s'imaginer que cela sauvera le noyau occidental", dit M. Reynes. Il cite une étude de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) selon laquelle il faudrait lâcher "à terme" 17 ours. Au-delà de la question du nombre, dit-il, "on aura à force des problèmes de consanguinité".

A ceux qui redoutent une augmentation du nombre de brebis tuées par l'ours, Alain Reynes répond que la présence du plantigrade a permis de mobiliser "des moyens de protection des troupeaux" comme les chiens de protection, les embauches de bergers, les clôtures électriques.

Cette mobilisation de moyens a "permis de réduire la mortalité globale" dans les troupeaux, assure-t-il; les principales causes de mortalité (20 à 30.000 brebis meurent chaque été) sont les chutes, les maladies et les prédateurs tels que les chiens, explique-t-il.

Selon la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) de Midi-Pyrénées, l'ours a tué en 2010 167 bêtes, pour l'essentiel des brebis: c'est légèrement plus qu'en 2009, mais cela reste moins de 1% des pertes annuelles infligées aux troupeaux.

Ces chiffres sont contestés par les associations anti-ours, qui y voient "l'écume" d'une réalité largement supérieure.

Lâcher d'ours: le public invité à se prononcer sur un sujet qui fâche